Le latéral attaquant

LE LATÉRAL ATTAQUANT

AU DOIGT ET À LA BAGUETTE

INTRODUCTION

Le poste de défenseur latéral a été transformé, d'abord un défenseur de côté comme l'indique son nom, il est, petit-à-petit, devenu une arme offensive à part entière. À l'époque, considéré comme un poste « mineur » au sein d'une équipe, il est maintenant primordial. Nous allons, dans cet article, observer et retracer l'évolution de ce poste et ses différentes utilisations, ses rôles, et son interprétation.

1 L'ÉVOLUTION DU FOOT

Le foot a grandement évolué, il était un « jeu », maintenant on décrypte tout, on analyse tout. L'aléatoire n'a plus sa place, on élabore des stratégies et met en place des situations, des adaptations et réactions à certaines situations pour maitriser le plus grand temps possible le cours d'un match et ne pas être surpris dans une situation non-prévue, non-donnée et ne laisser aucune chance à l'aléatoire. Alors on se met dans les meilleures situations possibles pour gagner grâce à des analyses, l'utilisation de la technologie et de la science. Le football est complètement différent, et on l'observe notamment par l'interprétation du poste de défenseur latéral.

2 QUI ÉTAIT-IL ?

Mais qui était ce latéral ? Celui, qui était un quatrième défenseur, qui prenait au marquage individuel l'ailier adverse, le moins technique, celui qui complétait la feuille de match. Pourtant, des latéraux techniques, qui ne se limitaient pas à réduire le « champ d'action » ou les possibilités offensives de son ailier, et qui, personnellement, étaient très loin d'être le dernier que je mettrai dans mon onze, il y en a eu plus d'un (Manuel Amoros, Giacinto Fachetti etc.). Mais, nous allons analyser le rôle qu'il occupait dans l'ancien foot. Dans une ligne de quatre défenseurs, il y avait le libéro, le plus technique, le plus intelligent. Le stoppeur, impassible, dur sur l'homme, c'était un bourrin, mais personne ne passait. Puis, les latéraux. Les caméras ne sont jamais braquées sur eux, ils ne marquent pas quarante buts par saison, ne dribble pas toute une équipe pour délivrer une passe décisive, ce ne sont pas non plus censé être les cerveaux de l'équipe. Mais alors, quel est leur rôle ? Ce sont des « porteurs d'eau » fidèles, l'image du jeu collectif, pas très techniques, mais rigoureux. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas, certains postes ont changé, celui de latéral principalement, qui a été amené à se révolutionner notamment avec le changement d'autres postes. Le latéral était celui qui gardait l'ailier sur son côté. Mais, outre le numéro dix, lui aussi était un joueur brillant - et l'est toujours - qui fait lever les foules. C'était un joueur technique, rapide, qui devait servir son avant-centre pour qu'il marque, et parfois, c'était lui qui marquait. Mais, il fallait l'éviter de centrer, c'était la tâche première de l'ancien latéral. Dans le football de maintenant, on a plein de joueurs de côté qui marquent plus que les n°9. Centrer n'est plus leur rôle premier, à tel point que beaucoup de gauchers jouent à droite et des droitiers à gauche, pas l'idéal pour centrer... Ils rentrent à l'intérieur, décochent une frappe, éliminent l'adversaire, ou créent le décalage en donnant le ballon à son latéral qui a pris la profondeur.

3 SES NOUVELLES FONCTIONS

Le foot est devenu beaucoup plus exigeant physiquement, et différent dans son approche. Alors qu'on prône le jeu de « transition », le latéral rentre parfaitement dans les plans de jeu, il s'agit de vite récupérer le ballon et de se projeter rapidement vers l'avant en contre-attaque, et pour ça, le latéral est parfait. Capable d'encaisser les aller-retour, de faire la « navette », de jouer comme un « contre-attaquant » etc.

Il ne pouvait plus se cantonner à son côté, tous les joueurs sont dans ce qu'on appelle le « dépassement de fonction », les attaquants de côtés rentrent dans l'axe et sont bien plus que des « centreurs ». Les ailiers n'existent plus vraiment, nous avons des joueurs excentrés avec un bagage technique minimal - bien que je trouve les attaquants de côté actuels moins fort techniquement qu'avant - et surtout ce sont des joueurs puissants, vifs et rapides, à l'image d'Mbappé, de Rashford ou encore Sterling parmi tant d'autres. On observe d'ailleurs un « schéma de jeu », une situation sur une phase de jeu donnée qu'on voit beaucoup : c'est l'attaquant qui rentre dans l'axe, ce qui va attirer le défenseur adverse et donc libérer un espace sur le côté, où va s'engouffrer le latéral en prenant la profondeur, c'est la création d'un décalage, il va pouvoir centrer. C'est le latéral, maintenant, qui va centrer, c'est une sorte d'ailier moderne. Il est endurant, précis dans ses centres, dotés d'une bonne vision du jeu, une sorte de créateur excentré. Mais, il y en a encore qui voient le latéral différemment.

4 LA CONCEPTION DU LATÉRAL DE 2021

Si le latéral est devenue une arme dangereuse offensivement, Deschamps nous rappelle qu'avant d'apporter le surnombre offensif, il reste un défenseur et se doit donc d'assurer derrière lui qu'il n'y ait aucun risque avant de pouvoir monter. Maldini nous rappelle lui aussi (dans le France Football Dream Team) que Capello lui disait : « Monte toutes les fois que tu veux, quand il y a de la place, mais rappelle-toi que tu dois avoir la force de revenir. » Il rappelle aussi que bien souvent il y avait un latéral plus offensif que l'autre, qui était à vocation défensive, et lorsque le latéral le plus offensif montait, l'autre composait avec ses deux centraux une ligne de trois. C'est encore valable aujourd'hui dans certaines équipes, même si les deux sont offensifs, rares sont les fois où les deux latéraux montent. Mais, ce n'est pas la vision du latéral de tout le monde, bien que ce soit celui de la majeure partie des entraîneurs actuels. Deschamps, lui, voit et interprète le rôle du latéral au sein de son équipe.

5 L'ANTITHÈSE DESCHAMPS

Didier Deschamps, notre sélectionneur national qui nous a emmené sur le toit du monde, est le contre-exemple parfait. Si aujourd'hui la plupart des équipes ont intégré cette évolution avec des latéraux offensifs, ce n'est pas le cas de Deschamps. D'un point de vue tactique, cette Équipe de France a beaucoup de similitudes avec celle de 1998 dont DD était capitaine. On peut se souvenir du latéral droit, qui était en faites un défenseur central : Lilian Thuram. C'est la même histoire pour le latéral droit de l'équipe actuelle : Benjamin Pavard, voire même pour Lucas Hernandez, à gauche. Deux latéraux qui assurent leur tache défensive avant de monter avec prudence encore. On peut dire que les latéraux étaient à l'image de l'équipe entière qui s'assurait de ne pas encaisser de but, qui jouait bas avant de « contre-attaquer » grâce à des joueurs rapides comme Mbappé pour pouvoir marquer. C'est cette efficacité en contre-attaque qui leur a permis de remporter les matchs cruciaux de ce Mondial.

6 L'EXPERTISE DE FOOTBALL TACTIQUE 

6.1 L'ÉVOLUTION DU POSTE DE LATÉRAL

« Avec un football de plus en plus stratégique, tous les rôles évoluent. Un ailier doit jouer extérieur mais aussi dans le bloc, un milieu doit savoir quand se projeter et quand rester plus bas, un attaquant quand et comment dézoner etc. Et le latéral aussi, aujourd'hui il n'est plus qu'un simple défenseur, ni juste un mec qui déborde et centre. il doit être capable de jouer à l'intérieur, de compenser son central si besoin etc. Donc tous les défenseurs ne savent pas tout faire, mais les meilleurs aujourd'hui sont les plus complet. Il suffit de voir des gars comme Lahm, Dani Alves ou Alaba qui sont latéraux/milieux qui jouent sur l'extérieur ou dedans etc. »

6.2 TACTIQUEMENT CA DONNE QUOI ? QUALITÉS ESSENTIELLES DU LATÉRAL PARFAIT

« Aujourd'hui, comme je l'ai dit, le latéral doit être complet. Mais par complet ça ne veut pas dire moyen partout hein. Mais il doit surtout être très intelligent pour savoir quand et comment s'adapter. Les latéraux qui rentrent dans l'axe comme on l'a vu avec Pep (Cancelo, Lahm ou Alaba) mais aussi des latéraux qui ne prennent plus leur couloir mais viennent participer à la construction, à l'image de ce que fait Sidibé depuis quelques matchs du côté de l'ASM. Donc les qualités du latéral moderne je ne sais pas, c'est rare un mec qui a tout. Mais c'est surtout un latéral qui doit être plus fort tactiquement, qui doit mieux comprendre le jeu. Et aussi, bien évidemment plus technique. Le latéral qui prend la balle déborde et centre en fermant les yeux... c'est compliqué. »

6.3 L'IMPORTANCE DU LATÉRAL MODERNE

« Je n'arrive pas à savoir si tel ou tel poste est essentiel. Tu as besoin de 11 mecs sur un terrain et ils sont tous importants. Par contre aujourd'hui le latéral peut apporter plus, mais plus dans le sens : plus de choses différentes. Comme je l'ai dit, avec le ballon il peut être un quasi-ailier ou être un 8. Donc son rôle a évolué et peut être amené à participer dans plus de zones différentes selon ce que l'équipe besoin. »

6.4 QUELLE PRIORITÉ ? L'APPORT DÉFENSIF OU L'APPORT OFFENSIF ?

Pareil, j'arrive pas à diviser. C'est la phrase ultra bateau mais on attaque à 11 et on défend à 11. Si j'ai une défense qui me fait de superbes relances mais qui ne sait pas défendre c'est inutile. Pour moi ce qui s'est le plus développé aujourd'hui c'est le cerveau du latéral. Je vais prendre l'exemple de Monaco actuellement. Ils ont un latéral gauche très offensif et qui aime jouer dans la largeur donc on le fait jouer dans cette zone, aussi parce que le milieu gauche (Diop) est à l'aise à l'intérieur. Côté droit par contre, l'ailier n'est pas à l'aise dans l'axe comme l'est Diop à gauche. Don Diatta (ou Gelson) joue bien ouvert et Sidibé lui va venir avec les 2 défenseurs centraux pour participer à la construction. Donc tu vois 1 équipe, 2 latéraux, et le coach ne demande absolument pas la même chose aux 2 joueurs.

BONUS : LE NOUVEAU RÔLE DÉFENSIF DU LATÉRAL

Le latéral doit pouvoir couvrir une éventuelle sortie de son défenseur central, et en situation défensive, il doit resserrer dans l'axe pour ne pas laisser d'espace et de possibilité de passe dans la profondeur (de plus, axiale), l'intervalle entre lui et son défenseur centrale est la seule possible pour lui mais elle est très importante car elle offre la moitié du temps but pour l'adversaire si le latéral n'est pas replacé dans l'axe. Il limite les possibilités de l'attaquant et le force ou, du moins, l'incite à faire telle passe ou tel dribble, ce qui lui permet d'anticiper.

CONCLUSION

Alors, faut-il que le latéral assure la tâche défensive avant de pouvoir apporter offensivement ou alors est-il un milieu offensif de côté ?

Il est en réalité le défenseur latéral de l'époque concernant l'aspect défensif mais il incarne aussi le rôle de l'ailier moderne.

Enfin, bref ce qu'il faut retenir c'est que le latéral n'est pas le joueur le moins bon d'une équipe au contraire il est primordial, il est comme on dit : « au doigt et à la baguette ».